Un saut en avion depuis Melbourne, et hop, nouvel État (Northern Territory) et changement radical d’ambiance. Nous voici dans le Centre Rouge, l’Outback, le désert australien. On nous avait promis l’enfer là-bas. Les conditions sont en effet un peu spéciales et difficiles en cette saison qui voit beaucoup moins de touristes qu’en juillet-août : il fait extrêmement chaud (autour de 40 degrés) et les mouches sont en nombre. Il faut donc s’adapter : ne prévoir des treks que le matin très tôt, et porter en permanence un très seyant flynet (filet anti-mouches). Notons que celles-ci ne sont pas méchantes, elles sont petites et ne piquent pas. OUI MAIS elles ont une prédilection pour le nez, la bouche et les oreilles. Ainsi parés, à l’aide d’une voiture de location hors de prix (et même pas 4*4) nous partons à la découverte des deux lieux les plus connus de l’Outback.
Kings Canyon se trouve à environ 300km de l’aéroport d’Uluru, dans le parc de Watarrka. Il s’agit, vous l’aurez deviné, d’un canyon profond de 100 mètres. On peut en faire le tour par le bord grâce à un trek sympa et varié de 6,5 km, le Kings Canyon Rim Walk. Le soleil tape fort, d’ailleurs pour éviter tout problème, le trek est fermé par les Rangers après 9h ou quand la température dépasse les 36 degrés. Nous marchons au milieu de belles concrétions oranges avant de descendre dans le canyon voir sa végétation. En terme de canyon on a déjà vu plus impressionnant (comme on se l’était dit aux Blue Mountains). Il semble bien que le Grand Canyon a pourri tous les canyons à venir ^^ L’hôtel où nous passons 2 nuits est au milieu de nulle part, avec rien autour, si ce n’est le désert. Même pas de réseau téléphonique, fermeture du « restaurant » à 18h30… Nous faisons plutôt notre propre BBQ, à l’australienne. Nous dormons dans une sorte de tente aménagée, qu’on fuit jusqu’au coucher du soleil pour ne pas y cuire !
La deuxième étape est plus confortable puisque nous revenons à Ayers Rock-Uluru, où un grand complexe a été construit près du parc national, avec hôtels, supermarché etc… Bon, finances obligent, on sera au camping 🙂 Pendant 3 jours et à divers moments de la journée nous voyons régulièrement Uluru, immense monolithe de grès sacré pour les Aborigènes. Positionné à l’exact centre de l’Australie, il a un périmètre de près de kilomètres et s’élève à plus de 300 mètres (et s’enfonce encore davantage dans le sol !). Il change de couleur, orange, rouge, grenat et même gris avec des cascades un soir de pluie (c’est apparemment très rare). Un matin aux aurores, toujours dans le même parc classé patrimoine mondial de l’UNESCO, nous faisons 50 kilomètres pour aller voir Kata Tjuta, un ensemble de rochers ronds cette fois. Nous faisons un très beau trek de plus de 7km qui permet de le traverser, le Valley of the Winds Walk. A noter que les prévisions de parcours sont un peu exagérées : encore une fois, au lieu des 4h prévues par le parc, nous bouclons très tranquillement le parcours en moins de 3h, en prenant le temps de faire des dizaines de photos des roches colorées et de la vallée verdoyante.
Le dernier jour, avant de prendre l’avion pour Brisbane, nous participons à une visite faite par un ranger du parc, sur le Mala Walk, au pied d’Uluru. Nous voyons que le ranger est un Aborigène, ce qui nous intéresse, car les seuls que nous avons croisés jusque là étaient des femmes dépenaillées et pieds nus au supermarché. Nous découvrons avec lui les grottes où se réfugiaient les nomades, les murs couverts de peintures rupestres datant d’à peine 100 ans parfois. En nous parlant d’Uluru et des rites aborigènes, parfois à mots couverts mais souvent très franchement, il dresse un tableau très noir de la situation de son peuple aujourd’hui. Rejeté dans des réserves « des communautés », très faiblement éduqués, rejetés du marché de l’emploi, survivant grâce aux coupons alimentaires, voilà comment les Aborigènes, habitants originels de l’île, sont encore traités aujourd’hui par le gouvernement de Canberra. Concrètement, à Uluru, le parc a été « rendu » en 1985 aux Aborigènes qui le même jour ont dû consentir un leasing de 100 ans à Parks Australia. Aujourd’hui la gestion est a priori partagée. Notre guide nous explique cependant que sa communauté ne touche que 10% des droits d’entrée payés par les touristes, et qu’il y a moins de 10 ans tous les Aborigènes salariés ont été licenciés sous prétexte d’illettrisme. L’emblème le plus éloquent de ce mépris ? Il est déconseillé mais encore bien autorisé de faire « the climb » c’est-à-dire d’escalader le rocher sacré, alors que c’est tout à fait interdit dans la culture Aborigène. En Océanie depuis plusieurs mois, nous connaissons la force des interdits, des « Tapu » pour les cultures d’ici. Nous les respectons et ne faisons évidemment pas l’ascension. Celle-ci n’est d’ailleurs pas nécessaire pour profiter des merveilles du rocher. Sans y être allé, on peut penser qu’il ne s’agit que d’un simple caillou posé au milieu du désert. Le voir, le sentir, en faire le tour, permet de comprendre que c’est bien plus que ça, qu’il y a presque quelque chose de magique en lui.
Nous quittons le désert, heureux d’avoir découvert le cœur australien, même si l’Histoire récente et actuelle nous révolte. Les paysages de l’Outback nous évoquent l’Australie éternelle. Tout compte fait, on a eu bien moins chaud qu’à Death Valley et on a eu moins d’insectes qu’en Amazonie. Vous avez dit enfer ?
L’album complet de ces 5 jours se trouve ici :
5 jours entre Kings Canyon et Uluru
Posté par A nous le tour sur jeudi 21 janvier 2016